Le talent de cet écrivain russe ne saurait cacher le deuxième aspect du personnage : celui d'un humaniste digne de ce nom. Toutefois, il reste difficile de le catégoriser malgré que d'aucuns le qualifient d'anarchiste chrétien.Noble de naissance, un 9 septembre 1828, il prit rapidement le parti de son peuple placé en état de pauvreté extrême et, malheureusement, réduit à une situation esclavagiste dans le cadre d'une société extraordinairement pyramidale. Rapidement orphelin, on le voit à vingt-cinq ans habillé d'un uniforme de sous-officier d'artillerie avec lequel il participa à la guerre de Crimée. Mais il n'est pas dupe. Pour lui, "les soldats sont des fauves dressés à mordre n'importe qui". Cette forte prise de position augure bien ce qui sera l'orientation sociale future de l'écrivain, orientation qui ne jamais fut démentie.
Son célèbre Guerre et Paix dresse un portrait de l'identité russe à l'occasion de la campagne de Russie opérée par les armées napoléoniennes. Ce titre ne fut pas choisi par hasard. Sa rencontre avec P.-J. Proudhon fut déterminante. En raison de sa remise en cause de la politique tyrannique des Tsars Alexandre 1er, Nicolas 1er, enfin d'Alexandre II, Tolstoi prit le parti du refus et utilisa souvent les pratiques de la non-violence que l'on retrouvera plus tard chez Gandhi. Sa remise en cause de l'orthodoxie religieuse, ainsi que son importante action pédagogique en faveur des enfants de paysans lui vaudront de multiples interdictions de la police et des institutions religieuses. Son excommunication en 1901 par l'église orthodoxe, ne l'empêcha pas de conserver une foi enthousiaste. Il publia différents ouvrages sur cette question, notamment dans les années 1880 : Ma confession ou Quelle est ma foi ? Ainsi, malgré ses sentiments et l'influence qu'exerça Proudhon sur lui, voire de Kropotkine, il semble difficile de le classer parmi les libertaires.
Étonnant personnage car la réflexion politique qu'il possédait et qu'il n'hésitait pas à affirmer était claire : "L'Etat est un complot qui a pour but, non seulement l'exploitation, mais la corruption des citoyens. Jamais je ne servirai nulle part aucun gouvernement." Avec de tels propos, il serait difficile de ne pas admettre que cette société impériale n'entendait pas lui souhaiter la bienvenue. Parmi ses grandes actions, notons que Tolstoi aida les objecteurs de conscience, fit face aux grandes famines des années 1891-1892 en organisant la distribution de nourriture pour des milliers de personnes. Bref, un intellectuel hors pair, un chantre du travail manuel, un apôtre d'une vie tournée sur la nature. Bref, il n'hésitait pas à "mettre les mains dans le cambouis".
Malade des poumons, il décéda cinq ans plus tard, le 20 novembre 1910, dans l'habitat du chef de gare d'Astapovo. Son enterrement, uniquement civil, fut le premier dans cette grande Russie. Saluons la mémoire, l'énergie et le talent de cet homme très attachant.
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9 septembre : Naissance de Léon Tolstoi
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Élections européennes du 26 mai : à quoi bon ?
34 listes sont en compétition. Bigre, est-ce sérieux ? Est-ce utile ?Une nouvelle fois le peuple est appelé à aller voter. Tous les respectueusement bien éduqués, tous les conformistes du civiquement correct, tous les "m'as-tu vu" iront remplir leur devoir… Mais, bon sang, à quoi bon pour ce drôle de "machin" comme l'appelait De Gaulle ? L'illusion démocratique serait une caractérisation plus exacte. Allons, revenons aux sources du problème communautaire.
Avant l'heure, P.-J. Proudhon dans son livre Du principe fédératif (1862-1864), posait bien le problèmes de cette communauté d'intérêts : "Ce qui fait l'essence du contrat fédératif, et sur quoi j'appelle l'attention du lecteur, c'est que dans ce système les contractants, chefs de famille, communes, cantons, provinces ou États, non seulement s'obligent synallagmatiquement et commutativemet les uns envers les autres, ils se réservent individuellement, en formant le pacte, plus de droits, de liberté, d'autorité, de propriété, qu'ils n'en abandonnent" (Chapitre VII).
A l'aune de ce qu'est devenu le "machin", relisez attentivement cette phrase. Vous constaterez que, à l'heure actuelle, nous en sommes très éloignés. C'est plutôt tout le contraire qui se passe. Alors, posons-nous cette question bien simple : faut-il faire confiance à ces listes et à tous ces personnages qui agissent à l'opposé des principes de liberté, de respect de l'autonomie des peuples ? Pourquoi devrions-nous leur donner une quelconque crédibilité en allant déposer un petit bout de papier dans cette petite boîte mise à notre disposition ? -
30 mai : Michel Bakounine
En ce 30 mai 1814, en Russie naît celui qui deviendra l'un des principaux et des plus féconds théoriciens de la pensée libertaire.
Il eut un parcours personnel (1814-1876) qui ressemble à une véritable épopée. Révolutionnaire bien sûr, il participera à tous les grands mouvement sociaux qui alors secouaient toute l'Europe. Mais également un véritablei intellectuel confirmé par ses multiples fréquentions de l'intelligentsia socialiste et hégélienne de l'époque. Nous pensons notamment à Herzen, Engels, Marx dont il sera l'un de ses traducteurs. Cette époque fut pour lui l'occasion de rencontrer Proudhon avec lequel il aura de nombreux entretiens ce qui l'amènera à entreprendre son véritable chemin initiatique en direction de la pensée anti-autoritaire et du fédéralisme libertaire.
Michel Bakounine fut aussi un révolutionnaire actif ce qui lui vaudra pas mal de moments de prison et d'exils un peu partout en Europe. A l'occasion des événements de 1848, il rédigea une brochure l'Appel aux slaves dans laquelle est établit son programme révolutionnaire. Il serait bien irrévérencieux de réduire ses écrits à un ou deux faits marquants. De la même manière, nous l'observons sur de nombreux fronts populaires, voire insurrectionnels. Il participa à la création de nombreuses organisations, en particulier dans le Jura suisse où il rencontra de nombreux proscrits. Il participa aussi à la construction de l'Association internationale des travailleurs où de fortes oppositions le confronteront à Marx et ses émules.
Bref, un personnage étonnant, intéressant et explosif, digne d'entrer à une belle place dans le Panthéon libertaire.