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11 août : Voline

Le fondateur du premier Soviet

Dans un XIXe siècle finissant, l'empire russe reste caractérisé par une société et une économie à dominante agricole, dans lequel n'existe qu'un faible niveau de vie. L'industrialisation n'y progresse que très lentement et jette rapidement sur les chemins une classe ouvrière grandissante. C'est dans ce pays aux forts contrastes que les divers courants socialistes vont s'organiser et disposer d'une influence non négligeable. Cela se constatera à l'occasion de nombreuses émeutes et, surtout, lors de plusieurs soulèvements  comme ceux de 1905 ou de 1917.

Voline 2.jpgVoline, de son vrai nom : Mikhaïlovitch Eichenbaum, naît le 11 août 1882 dans cet étonnant contexte. Issu d'une famille bourgeoise, c'est aux alentours de sa vingtième année qu'il se familiarise avec le mouvement et les idées révolutionnaires. Après la répression qui suivit les événements de 1905, le pouvoir russe l'exile dans des régions éloignées. Toutefois, il réussit à s'évader et il quitte l'empire pour une vie quelque peu errante entre Europe et États-Unis. Dès que se déclenche les soulèvements de 1917, il rentre au pays et adhère à l'Union anarcho-syndicaliste de Saint-Pétersbourg. Durant quatre ans il participe à de nombreuses activités, en particulier à l'organisation de la Fédération anarchiste d'Ukraine. En s'organisant, le nouveau pouvoir communiste traque, élimine et emprisonne à tour de bras tous les membres du mouvement anarchiste – et des autres partis – notamment le mouvement ukrainien, Makhno en tête. Libéré après pas mal de péripéties, il part définitivement s'installer dans des pays plus "tranquilles"...

Voline est considéré comme le théoricien du concept de la synthèse anarchiste. Qu'est-ce à dire ? Inspiré sans doute par la nature des événements russes puis de ceux d'Espagne, il n'admet pas que l'on puisse découper l'anarchisme en tranches : l'individualisme, l'anarcho-syndicalisme et le collectivisme anarchiste. Pour lui, l'individu est toujours individualiste dans sa vie personnelle, syndicaliste dans le cadre de son milieu professionnel et, enfin, dans la cité il apporte un aspect organisationnel de nature collectiviste. Avec d'autres, je pense en particulier à Sébastien Faure avec lequel il collaborera à la rédaction de l'Encyclopédie anarchiste, Voline inspire cet esprit pluriel que l'on retrouve dans plusieurs fédérations nationales - notamment la Fédération anarchiste française – où cohabitent ces différents courants. Cela n'empêchera pas toutefois l'apparition de scissions en leur sein ou, en dehors, la création de mouvements spécifiques.

Voline 3.jpgLe deuxième aspect intéressant de ce personnage réside dans l'action libertaire qu'il a menée. On l'ignore bien souvent - pire on l'occulte ! - Voline fut l'un des fondateurs du tout premier Soviet. Contrairement à cette idée largement propagée par les communistes notamment, cette structure ne leur doit rien, pas plus d'ailleurs qu'aux autres courants : socialiste, menchevik et bolchevik. Dans "La révolution inconnue", son magistral livre édité en 1947, l'auteur consacre un chapitre entier sur "La naissance des Soviets". Lisons-le :
"...J'ai été mêlé de près à la naissance du premier « Soviet des délégués ouvriers », créé à Saint-Pétersbourg, non pas à la fin, mais en janvier-février 1905. Aujourd'hui [1946-1947], je dois être à peu près le seul qui puisse relater et fixer cet épisode historique, à moins que l'un des ouvriers qui prirent part alors à l'action soit encore en vie et à même de raconter un jour." Il nous explique la nature constitutive de cette nouvelle structure ainsi que ses objectifs initiaux. Ce ne sera qu'en décembre 1905 que Léon Trotski s'emparera de la présidence de ce soviet. Et on connaît la suite : ces collectivités prendront sous le joug communiste une orientation bien éloignée de sa matrice originelle...

Si vous avez l'occasion de vous procurer cet ouvrage – ce que nous vous conseillons vivement - un tout autre regard s'offrira à vous vis-à-vis de cette grande révolution. Une vision qui n'a rien à voir avec tous les poncifs marxistes ou bourgeois qui ont travestis ou déconsidérés cette expérience révolutionnaire. Comme d'autres dans le monde, son évolution a complètement déconsidérée ses profondes aspirations originelles. Quel beau gâchis !

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