Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • 15 septembre 1972 : Suzy Chevet nous quitte

    C'était hier, à la fin des grandes vacances passées à Port Grimaud (Côte d'Azur) que Suzy en traversant la route va être renversée et blessée mortellement. Pour son compagnon Maurice Joyeux et ses fille, gendre et petits-enfants, perdre aussi brutalement l'être aimé reste terrible. Affectivement ce le fut aussi pour le jeune militant que j'étais et qui la fréquentait très régulièrement durant ses dernières années d'existence.

     

    Chevet Suzy Carrare 1968.jpgSuzy consacra toute sa vie d'adulte à l'action militante. Elle venait du socialisme – de sa frange radicale - pour terminer à l'anarchisme et au syndicalisme révolutionnaire. La biographie ci-dessous relate ce que fut le parcours de sa vie. Ce fut sa rencontre avec Maurice Joyeux* qui resta décisive dans cette nouvelle direction qui ne la quittera plus.

     

    Un étonnant petit bout de femme que cette militante au grand cœur. Elle possédait un charisme étonnant doublé d'un dynamisme extraordinaire. Ces deux qualités surent nous entraîner en faveur du développement de la Fédération anarchiste et du groupe auquel elle tenait tant et qui lui permit de posséder de nombreux militants et amis de qualité. Passionnée de culture et de musique, Suzy fréquentait régulièrement les cabarets, particulièrement ceux où se produisaient de jeunes artistes dont elle favorisera leur lancée. Cela également lui permit de mettre en œuvre son talent d'organisatrice de galas de soutien, tant pour Force Ouvrière que pour la Fédération Anarchiste, son groupe libertaire et bien d'autres organisations : Libre Pensée, Soutien au mouvement libertaire espagnol, Franc-maçonnerie, etc. Ces manifestations remplissaient les grandes salles de l'époque et permettront notamment au mouvement libertaire de se doter des moyens financiers qui lui permettront d'accroître son rayonnement : journal hebdomadaire, radio et revue.

     

    Sa force de caractère, son obstination avaient raison de toutes les difficultés qui apparaissaient durant les phases d'action et qui auraient pu en faire hésiter plus d'un. Dans l'article nécrologique que nous lui consacrerons à l'occasion de la sortie de la revue libertaire La Rue n°14 (3e trimestre 1972), nous écrivions alors : "...Tous les camarades du Groupe libertaire Louise Michel qui la connaissaient autrement que sous un angle militant, perdent une amie authentique. Elle savait dialoguer et comprendre tous les problèmes que les nécessités de la vie leur imposaient. Chacun de nous lui contait ses déboires, ses petits ou ses grands ennuis et elle trouvait toujours le mot juste, la parole ou le geste de réconfort qui nous ragaillardissait". Avant de partir en vacances, elle nous fera part de sa hâte à voir sortir ce numéro spécial : "Marxisme ou Anarchisme". Elle y publia son dernier article, titré A l'usine, qui se concluait ainsi : "On peut raisonnablement penser qu'après un temps plus ou moins long la balance penchera vers le mouvement, vers l'évolution, vers l'anarchisme. De toute façon la chance de l'anarchisme est la chance de l'évolution et on voit mal comment les mutations de la société devraient se cantonner à des expériences qui ont été partout des échecs". Les propos sont clairs et nets et ils restent terriblement actuels !

     

    Suzy avait le feu sacré, celui du Prométhée transmetteur. Elle reste pour nous la belle figure d'une femme sensible, fraternelle**, en bref, celle d'une égérie inoubliable qui nous laisse encore aujourd'hui un profond sentiment d'amertume.

     

    _______

    * Dans ses Souvenirs (deux tomes), Maurice évoque avec force détails sa relation avec celle qui fut sa dernière compagne.

    ** Signalons la note de Léo Campion, parue dans son livre Le drapeau noir, l'équerre et la compas, qui rappelle son appartenance à la Franc-maçonnerie (Droit Humain), à la loge Raspail puis Louise Michel.

     

     

    Brève biographie (reprise en partie dans l'Éphéméride anarchiste) :

    Née le 25-09-1905 à Montjean (Maine-et-Loire).

    Fille d'un père syndicaliste et mutualiste.

    Élève de l’École Normale d'Institutrices d'Angers, elle devient institutrice.

    Militante au sein du Parti Socialiste (tendance Marceau Pivert).

    S'occupe des Auberges de Jeunesse. Elle créa celle de Saint-Malo.

    1938 : participation aux Comités d'aide à la révolution espagnole.

    1941 : révocation de l'enseignement et assignée à résidence.

    Organisatrice d'une filière d'évasions passant par l'île anglo-normande de Jersey.

    1942 : Arrêtée par la Gestapo, transférée à Angers. Réussie une évasion et rejoint Lorient. Sous une fausse identité, elle arrive à travailler dans les bureaux du STO jusqu'à la Libération. Cela lui permet de renseigner la Résistance.
    Après la Libération, elle arrive à Paris où elle a du mal à retrouver un poste d'enseignante. Elle finit par trouver un emploi au Ministère du Travail
    dans lequel elle termina comme inspectrice.

    En 1945, elle rencontre Maurice Joyeux qui deviendra son compagnon. Elle milite à ses côtés au sein de la Fédération anarchiste. Elle animera le "Groupe de L'Ouest" qui deviendra le "Groupe Louise Michel".

    Milite également à "La Libre Pensée" et à "La Ligue des Droits de l'Homme".

    En 1947 participe à la création de la "CGT-Force Ouvrière" et sera membre de la commission exécutive de la région parisienne.

  • Le miel du lion

    BRÈVE DE LECTURE

    Le miel du lion
    de Matthew Neill Null
    (420 pages, 23 €, Albin Michel, mai 2018)

     

    Le miel du lion.jpgVoici un roman qui vous fera voyager puisque l'action se déroule en Virginie (États-Unis) durant les années 1900. Cette remontée dans le temps nous replace dans un contexte régional avec, pour cadre, une gigantesque et très ancienne étendue forestière dont l'exploitation - puis la disparition - va contribuer à l'essor général du continent nord-américain.

    L'auteur va dépeindre la vie et le labeur des bûcherons, ces "loups de la forêt" venus des quatre coins du monde à la recherche d'un nouvel eldorado. La fresque est magnifique. Les tensions humaines y sont extrêmement fortes et bien décrites, avec comme trame de fond des rapports de lutte sociale et syndicale particulièrement violents.

    Une belle saga au confluent d'une époque rude dans un pays en plein devenir.

  • Jupiter adore le vieux monde

    Ouf ! je sens que vous êtes bien soulagé de le savoir : le perchoir est pourvu !

     

    Les marcheurs, futés et affûtés par les consignes données au mouvement, ont majoritairement élu leur homme de la situation, le sieur Richard Ferrand. Nous sommes dans l'anecdotique, pas même une surprise, pas l'ombre d'un doute, c'était prévu et c'était quasi automatique cette récompense à ce personnage tout dévoué à la cause présidentielle. En sorte, une élection de pure forme...

     

    Dans cette saga du pouvoir, constatons que ce récent mouvement des marcheurs et son Jupiter, la tête de gondole, font une fois de plus du neuf avec du vieux. Car, malgré les affirmations péremptoires du grand chef, le vieux monde colle bien à la peau de ces hommes de parti. L'image médiatique de nouveautés qu'ils veulent insuffler reste passablement trompeuse. En effet, ils n'ont pas honte d'élire un homme toujours en prise avec la justice. Si vous appelez cela de la nouveauté, je suis prêt à me jeter à l'eau lesté d'une belle et lourde pierre plate !

     

    Notre Jupiter et sa cohorte de suiveurs marcheurs ne possèdent pas une once de scrupules pour mettre au poste de quatrième personnage de l’État, ce citoyen faisant l'objet de poursuites judiciaires. Ce dernier d'ailleurs ne dispose pas d'avantage de retenue éthique. Il aurait dû se retirer de l'arène politique, ne serait-ce que provisoirement. Constatons une nouvelle fois que, pour lui comme pour beaucoup d'autres, la toute puissance et les ors du pouvoir exercent une attraction et une fascination considérables, effaçant du même coup toute once de moralité.

    PSU Affiche 1968.jpg

    Comprenne qui pourra mais c'est tout réfléchi. Comment se gêner à surfer sur la ligne blanche de l'autorité dès lors que les exemples viennent de partout à commencer par le haut de cette abominable hiérarchie sociale ? Ce comportement politique insupportable n'est pas sans nous rappeler l'ancienne affiche éditée par le PSU (parti socialiste unifié) durant l'année 1968. Soyez rassurés, c'est juste pour le décor. Car comment ignorer cette évolution logique d'un parti et comment il a fini, notamment son leader Michel Rocard… Bel exemple d'un double langage qui prétendait aussi faire du neuf en masquant, grâce à une vieille phraséologie, les réalités du pouvoir.

     

    1968-2018, cinquante ans nous en séparent. Depuis, qu'est-ce qui a changé ? Il ne suffit pas d'affirmer qu'il faut réenchanter le monde, il faut le faire en s'en donnant les moyens. Dans la bouche de tous les aspirants aux plus hautes marches de l’État, puis de ceux qui y accède, nous avons l'impression qu'ils resservent les mêmes plats. On tourne en rond : encore une élection pour rien...