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Rechercher : Proudhon

  • 15 janvier : Pierre-Joseph Proudhon

    Depuis ce jour de l'année 1809, quel parcours que celui de ce petit bouvier, né d'un garçon brasseur et d'une mère cuisinière...

    Comment ne pas commencer ce quinzième jour d'une nouvelle année par celui que l'on considère comme le père et le principal théoricien de l'anarchisme ? En ce jour anniversaire, je vous propose d'appréhender l'homme sous son aspect le moins connu. Pour le reste, on trouvera assez facilement sur Internet ou à partir de plusieurs ouvrages, une grande partie de ses réflexions pour le moins décapantes.

    C'est ainsi que j'ai le plaisir de vous soumettre cette vie étonnante, écrite il y a près de trente ans maintenant dans la revue "Itinéraire" (n°7, 1er trimestre 1990)...

     

    "Révolutionnaire... et franc-maçon !

    La pensée de Proudhon, riche par sa fécondité et par sa diversité,

    l'est également par ses contradictions.

    Comment un révolutionnaire peut-il devenir franc-maçon ?

    Cet article tente d'éclairer

    un aspect peu connu de la vie du théoricien anarchiste.

    Sans doute parce qu'il fut l'initiateur de l'anarchisme, Pierre-Joseph Proudhon reste à bien des égards le plus remarquable de tous les grands théoriciens de la pensée révolutionnaire. Son œuvre ressemble à un gigantesque et fantastique magma en fusion duquel jaillit, si l'on s'y attarde, de nombreuses pistes de recherche que, pour notre part, nous ne nous lassons pas de découvrir.

     

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      Réconcilier l'irréconciliable !

    Malheureusement, et nous en sommes confus, il serait bien prétentieux de notre part d'apporter une réponse définitive sur cette décision de Proudhon d'entrer en franc-maçonnerie. D'une part, parce que celui-ci n'a jamais formulé d'explications précises quant à sa démarche, ce qui aurait eu l'avantage de nous éclairer. D'autre part, parce qu'il nous semble que ce choix s'apparente davantage à une démarche personnelle que l'homme n'a pas jugé utile d'expliciter. Cela peut justifier l'embarras et le silence des chercheurs sur ce point délicat. En tout cas, cela n'arrange guère notre propos. Mais, après tout, n'y a-t-il pas chez Proudhon comme chez chacun un jardin secret qu'il n'entendait pas dévoiler par peur d'être incompris ou, plus prosaïquement, parce qu'il ne souhaitait pas nécessairement le partager ?

    Revenons à Besançon ce 8 janvier 1847. Proudhon a tout juste 38 ans et l'un de ses ouvrages les plus importants, Système des contradictions économiques ou Philosophie de la misère, vient de paraître. La sortie de ce livre fut discrète. Le Journal des Économistes, d'ailleurs, n'en rend compte qu'en novembre 1847. A propos de cet ouvrage, dans une lettre écrite à Guillaumin, datée du 7 novembre 1846, l'auteur affirme : "Si je pouvais faire battre tout le monde, j'aurais obtenu justement le résultat que je me suis proposé : la réconciliation universelle par la contradiction universelle". Déjà, avec son mémoire sur la Propriété, Pierre-Joseph nous a habitué aux formules assassines qui ne sont pas faites pour nous déplaire. Que l'on ne s'y trompe pas, derrière ces propos provocants se cache un humaniste au grand cœur. La réconciliation universelle par la contradiction universelle, les mots

  • 7 avril : Charles Fourier : comment concevoir l'utopie ?

    Bisontin de naissance (en l'an 1772), Charles Fourier a largement contribué à influencer tout le courant socialiste et humaniste des XIXe et XXe siècles.

    On lui doit l'une des toutes premières analyses critiques de la société pré-industrielle. Mais cela ne lui suffisait pas. Il conceptualisa les principes d'une société communautaire qu'il voulait harmonieuse. Il envisagea la construction de phalanstères, c'est-à-dire des ensembles de bâtiments avec des fonctions communes, sur la base du libre consentement de ses membres.

    utopie,victorconsidérant,proudhon pierre-joseph,karl marx,michel ragon,thomas moreL'un de ses fidèles adeptes, Victor Considérant, en fit une description pleine d'emphases : "Contemplons le panorama qui se développe sous nos yeux. Un splendide palais s’élève du sein des jardins, des parterres et des pelouses ombragées, comme une île marmoréenne baignant dans un océan de verdure. C’est le séjour royal d’une population régénérée. Devant le Palais s’étend un vaste carrousel. C’est la cour d’honneur, le champ de rassemblement des légions industrielles, le point de départ et d’arrivée des cohortes actives, la place des parades, des grandes hymnes collectives, des revues et des manœuvres. La route magistrale qui sillonne la campagne de ses quadruples rangées d’arbres somptueux, bordées de massifs d’arbustes et de fleurs, arrive, en longeant les deux ailes avancées du Phalanstère, sur la cour d’honneur, qu’elle sépare des bâtiments industriels et des constructions rurales, développées du côté des grandes cultures. Au premier rang de la ville industrielle, une ligne de fabriques, de grands ateliers, de magasins, de greniers de réserve, dresse ses murs en face du Phalanstère" (1846).

    Charles Fourier s'était fixé comme objectif de classer l'humanité en pas moins de 810 catégories d'individus. Il en découlait une organisation de phalange comprenant 1620 membres (mixité oblige sans doute !). De toute évidence, son système semble assez fumeux...

    Malheureusement, de son vivant aucune réalisation phalanstérienne ne verra le jour. La première fut tentée trois ans après sa disparition (1833), à Condé-sur-Vesgres (Yvelines) et ne dura que quelques mois. Seuls le Familistère et la manufacture de Godin (1861) seront des exemples plus ou moins achevés. Ils comportèrent quelques idées novatrices et intéressantes comme celle, par exemple, de la création d'une crèche. Compte-tenu des conditions ouvrières de l'époque c'est pas mal du tout !

    Marx et Proudhon firent des critiques sévères à l'égard de cette idéologie, en particulier vis-à-vis de l'un de ses supporters : Victor Considérant (in P.-J. Proudhon : De la création de l'ordre dans l'humanité). Plus récemment, et sur un registre différent, Michel Ragon décortiqua la tentative urbaine de Charles Fourier. Il conclura ainsi : "Il n'est de pires tyrans que les philanthropes" (in L'homme et les villes).

    Après Tomas More et tant d'autres utopistes, Fourier eut le mérite incontestable d'imaginer la possibilité de construction d''un monde nouveau. En cela, malgré tout ce qui a pu être dit sur le personnage et son côté chimérique, son œuvre aura été et restera porteuse d'espoir pour l'humanité.

  • 26 juin : journée de tristesse

    Entre un 26 juin 1848 et un 26 juin 2019 :

    TOUT  RESTE À FAIRE !

    Il y a seulement quelques semaines encore des milliers de citoyens battaient le pavé de nombreuses villes du pays pour s'opposer aux mesures coercitives du gouvernement touchant notamment leur niveau de vie. Cette réaction dite des "gilets jaunes" traduit l'importance du mécontentement populaire contre des politiques qui servent les intérêts du système en place.

    Fév.1848 R.Viollet.jpgCe mécontentement, aussi fort qu'il fut, représente tout de même peu de choses face à cette terrible journée parisienne du 26 juin 1848. Dès 10 heures du matin, l'armée se mit à investir le dernier îlot de résistance du Faubourg Saint-Antoine. Ce 26 juin, qui conclut la révolution du 23 février*, sombra dans une effroyable et impitoyable répression. Des milliers d'insurgés furent abattus (5700) et 11.000 autres en attente de jugement, seront affreusement entassés dans les prisons... Une fois de plus c'est un militaire, le général Cavaignac, qui s'emparait du pouvoir, chargé par la bourgeoisie pour démanteler les acquis de cette brève révolution.

    Avec le recul dont nous disposons aujourd'hui, tout prouve - s'il en est besoin – que l'utopie se retrouve souvent avec cette vaine croyance en la politique et leurs politiciens, comme si cela pouvait changer fondamentalement la société. Dans ses Carnets Proudhon (élu député les 4-5 juin) ne se faisait aucune illusion sur le sujet : "Ce qui est vrai hier, est vrai aujourd'hui : la réforme politique n'est pas le moyen de la réforme sociale". Une autre grande personnalité, Alexis de Tocqueville, son contemporain et un adversaire déclaré des révoltés de 1848, écrivait alors : "Il y a eu des révolutionnaires plus méchants que ceux de 1848, mais je ne pense pas qu'il y en ait eu de plus sots ; ils ne surent ni se servir du suffrage universel, ni s'en passer. S'ils avaient hardiment saisi la dictature, ils auraient pu la tenir quelques temps dans leurs mains. Mais ils s'imaginèrent niaisement qu'il suffisait d'appeler la foule à la vie politique pour l'attacher à leur cause et que, pour faire aimer la République, c'était assez de donner des droits sans procurer des profits". La messe était dite. Malheureusement et à chaque fois, on assiste à sa répétition et, le piège politique se referme toujours sur un peuple-enfant.

    En ce jour du très macabre anniversaire d'une sanglante défaite populaire : gémissons, gémissons, gémissons ...mais espérons ! Les quelques succès - très relatifs d'ailleurs - de journées de protestation qui égrenèrent l'histoire de notre peuple ne peuvent nous faire oublier qu'il manque encore et encore ce souffle géant d'un grand soir rédempteur !
     

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    Drapeau.jpg
    * Il est intéressant de constater que, selon l'historien Maurice Dommanget, le drapeau rouge fit sa première apparition le 22 février 1848 (ou le 23 selon les narrateurs) sur les barricades parisiennes. Ce qui fit dire à Proudhon : "Pauvre drapeau rouge ! Tout le monde t'abandonne ! Eh bien ! Moi, je t'embrasse ; je te serre contre ma poitrine." Mais déjà, le soir du 24 février, Lamartine relatait un fait étrange : l'existence à côté des drapeaux rouges de drapeaux noirs qui "flottent en lambeaux aux bouts des baïonnettes"...